L'évangile de Pierre

Le fragment d’évangile qui nous a été conservé par le parchemin découvert à Akhmîm, renferme un récit de la passion, de la mort et de la résurrection de Jésus, qui, sur bien des points, diffère de celui des évangiles canoniques. Pour mieux faire ressortir ce qui appartient en propre à la nouvelle narration, nous avons mis en italique les traits qui, de près ou de loin, rappellent les évangiles entrés dans le canon. Le récit commence au moment où Pilate vient de se laver les mains.




1 Mais aucun des Juifs ne se lava les mains, ni Hérode ni aucun de ses juges.
2 Et comme ils ne voulaient pas se [les] laver, Pilate se leva. Et alors le roi Hérode ordonne de se saisir du Seigneur, leur disant : « Tout ce que je vous ai ordonné de lui faire, faites-le. »
3 Or Joseph, l’ami de Pilate et du Seigneur, se tenait là : et, sachant qu’on allait le crucifier, il vint vers Pilate et demanda le corps du Seigneur pour l’ensevelir.
4 Et Pilate envoya demander à Hérode son corps [de Jésus].
5 Et Hérode dit : « Frère Pilate, quand même personne ne l’aurait demandé, nous, nous l’aurions enseveli, puisqu’aussi bien voici poindre le sabbat ; car il est écrit dans la loi, que le soleil ne se couche point sur un homme mis à mort. » Et il le livra au peuple la veille des Azymes, leur fête.

6 Mais eux, ayant pris le Seigneur, le poussaient en courant et disaient : « Traînons le Fils de Dieu, maintenant que nous sommes maîtres de lui. »
7 Et ils le revêtirent d’un manteau de pourpre et le firent asseoir au tribunal, disant : « Juge équitablement, roi d’Israël. »
8 Et l’un d’eux, ayant apporté une couronne d’épines, la plaça sur la tête du Seigneur.
9 Et d’autres se tenant debout lui crachaient au visage, et d’autres lui souffletaient les joues. D’autres le piquaient avec un roseau et quelques-uns le fouettaient, disant : « Rendons ces honneurs au Fils de Dieu. »

10 Et ils amenèrent deux malfaiteurs, et crucifièrent le Seigneur entre eux. Mais lui se taisait comme s’il n’eût ressenti aucune souffrance.
11 Et lorsqu’ils eurent dressé la croix ils y inscrivirent : « Celui-ci est le roi d’Israël. »
12 Et ayant déposé ses vêtements devant lui, ils les partagèrent et jetèrent le sort sur eux.
13 Mais l’un de ces malfaiteurs leur fit des reproches, disant : « Pour nous, c’est à cause du mal que nous avons fait que nous souffrons ainsi ; mais celui-ci, qui est devenu le Sauveur des hommes, quel mal vous a-t-il fait ? »
14 Et, s’étant irrités contre lui, ils ordonnèrent qu’on ne lui rompît pas les jambes, afin qu’il mourût dans les tourments.

15 Or il était midi ; et les ténèbres s’emparèrent de toute la Judée, et ils étaient troublés et se demandaient avec inquiétude si le soleil s’était couché, attendu qu’il vivait encore (il est écrit pour eux que le soleil ne se couche pas sur un homme mis à mort).
16 Et l’un d’eux dit : « Donnez lui à boire du fiel avec du vinaigre. » Et ayant fait le mélange, ils lui donnèrent à boire.
17 Et ils consommèrent toutes choses et accumulèrent sur leurs têtes leurs péchés.
18 Beaucoup circulaient avec des flambeaux, pensant que c’était la nuit et ils se mettaient à table.
19 Et le Seigneur cria disant : « Ma puissance, ma puissance, tu m’as abandonné. » Et, à ces mots, il fut enlevé.
20 Et à l’heure même le voile du temple de Jérusalem se déchira en deux.

21 Et alors ils arrachèrent les clous des mains du Seigneur et le posèrent sur la terre, et la terre entière trembla, et il se répandit une grande crainte.
22 Alors le soleil brilla, et il se trouva qu’il était la neuvième heure.
23 Les Juifs donc se réjouirent et donnèrent à Joseph son corps, afin qu’il l’ensevelît ; car il (Joseph) avait été témoin de tout le bien qu’il (Jésus) avait fait.
24 Ayant donc pris le Seigneur, il le lava et l’enveloppa d’un linceul et le transporta dans son propre tombeau appelé le jardin de Joseph.
25 Alors les Juifs et les anciens et les prêtres, ayant compris quel mal ils s’étaient fait à eux-mêmes, commencèrent à se lamenter et à dire : « Malheur à nos péchés ; le jugement et la fin de Jérusalem approchent. »

26 Pour moi, je m’affligeais avec mes compagnons ; et, l’esprit blessé, nous nous cachâmes ; car nous étions recherchés par eux, comme malfaiteurs et comme voulant incendier le temple.
27 À cause de tout cela nous jeûnions et nous étions assis dans le deuil et pleurant nuit et jour jusqu’au sabbat.
28 Mais les scribes et les Pharisiens et les anciens s’étant réunis ensemble, et ayant appris que tout le peuple murmurait et se frappait la poitrine disant : « Si à sa mort ces grands signes se sont produits, voyez combien il était juste ! »
29 les anciens prirent peur ; et ils vinrent vers Pilate, le priant et disant :
30 « Confie-nous des soldats, afin que nous gardions son tombeau pour trois jours, de peur que ses disciples ne viennent le dérober et que le peuple ne croie qu’il est ressuscité des morts et qu’on ne nous fasse du mal. »

31 Pilate donc leur donna le centurion Pétronius avec des soldats pour garder le tombeau. Et les anciens et les scribes allèrent avec eux au tombeau.
32 Et ayant roulé une grande pierre avec l’aide du centurion et des soldats, d’un commun effort, tous ceux qui étaient là la placèrent sur la porte du tombeau,
33 et apposèrent sept sceaux ; et ayant planté là une tente, ils montèrent la garde.
34 Le matin donc, comme le sabbat commençait à poindre, il vint une foule de gens de Jérusalem et des environs, pour voir le tombeau scellé.

35 Or, dans la nuit par laquelle s’ouvrait le dimanche, comme les soldats en faction montaient la garde deux à deux, une grande voix se fit entendre dans le ciel,
36 et ils virent les cieux ouverts et deux hommes qui en descendaient, tout resplendissants de lumière, et qui s’approchèrent du tombeau.
37 Cette pierre qui avait été placée sur la porte, ayant roulé d’elle-même, s’écarta de côté ; et le tombeau s’ouvrit. Et les deux jeunes gens entrèrent.
38 Lors donc qu’ils eurent vu cela, ces soldats éveillèrent le centurion et les anciens ; car eux aussi étaient là faisant la garde.
39 Et comme ils (les soldats) racontent ce qu’ils ont vu, de nouveau ils voient sortir du tombeau trois hommes et les deux soutenir l’un, et une croix les suivre ;
40 et la tête des deux atteignait jusqu’au ciel, mais la tête de celui qui était conduit par eux dépassait les cieux.
41 Et ils entendirent une voix disant du haut des cieux : « As-tu prêché à ceux qui se sont endormis ? »
42 Et l’on entendit une réponse venir de la croix : « Oui. »
43 Ceux-là donc se demandaient les uns aux autres s’il ne fallait pas partir et rapporter ces choses à Pilate.
44 Et, tandis qu’ils délibéraient encore, apparaissent de nouveau les cieux ouverts, et un homme qui en descend et entre dans le tombeau.

45 Ayant vu cela, le centurion et ses gens, de nuit, se hâtèrent d’aller chez Pilate, abandonnant le tombeau qu’ils gardaient ; et ils racontèrent tout ce qu’ils avaient vu, vivement inquiets et disant : « Véritablement il était Fils de Dieu. »
46 Pilate répondant, dit : « Moi, je suis pur du sang du Fils de Dieu : c’est vous qui en avez décidé ainsi. »
47 Tous alors s’approchant, le priaient ; et ils lui demandaient d’ordonner au centurion et aux soldats de ne rien dire de ce qu’ils avaient vu.
48 « Car il nous importe, disaient-ils, étant coupables du plus grand péché devant Dieu, de ne pas tomber [encore] aux mains du peuple des Juifs et de n’être pas lapidés. »
49 Pilate ordonna donc au centurion et aux soldats de ne rien dire.

50 À l’aube du dimanche, Marie Madeleine, disciple du Seigneur (par crainte des Juifs, parce qu’ils étaient enflammés de colère, elle n’avait pas fait sur le tombeau du Seigneur ce que les femmes ont coutume de faire pour les morts et pour ceux qui leur sont chers),
51 ayant pris avec elle ses amies, vint au tombeau où il avait été déposé.
52 Et elles craignaient que les Juifs ne les vissent et disaient : « Bien qu’en ce jour où il a été crucifié nous n’ayons pas pu pleurer et nous lamenter, maintenant du moins faisons-le sur son tombeau.
53 Mais encore qui nous roulera la pierre mise sur la porte du tombeau, afin qu’étant entrées nous nous asseyions auprès de lui et que nous fassions ce qu’il faut.
54 Car la pierre était grande ; et nous craignons que quelqu’un ne nous voie. Et si nous ne pouvons, déposons du moins à la porte ce que nous apportons en mémoire de lui : nous pleurerons et nous lamenterons jusqu’à ce que nous soyons [re]venues dans notre maison. »

55 Et s’en étant allées, elles trouvèrent le tombeau ouvert. Et s’approchant, elles se baissèrent pour y regarder ; et elles voient là un jeune homme, assis au milieu de la tombe, beau et revêtu d’une robe très éclatante, qui leur dit :
56 « Pourquoi êtes-vous venues ? qui cherchez-vous ? Est-ce ce crucifié ? il est ressuscité et s’en est allé. Que si vous ne le croyez pas, regardez et voyez qu’il n’est plus au lieu où il était étendu ; car il est ressuscité et s’en est allé là d’où il avait été envoyé. »
57 Alors les femmes effrayées s’enfuirent.

58 Or c’était le dernier jour des Azymes ; et beaucoup sortaient, s’en retournant dans leurs maisons, la fête étant finie.
59 Pour nous, les douze disciples du Seigneur, nous pleurions et nous affligions ; et chacun, affligé de ce qui était arrivé, se retira dans sa maison.
60 Mais moi, Simon Pierre, et André, mon frère, ayant pris nos filets, nous nous en allâmes à la mer ; et il y avait avec nous Lévi, fils d’Alphée, que le Seigneur...

Deux choses me surprennent dans cet évangile...

La première : 19 Et le Seigneur cria disant : « Ma puissance, ma puissance, tu m’as abandonné. » Et, à ces mots, il fut enlevé. [élie (élija) = "mon Dieu est l'éternel"]

La seconde : 33 et apposèrent sept sceaux ; et ayant planté là une tente, ils montèrent la garde.

J'ajouterai à cela : Le jardin de Joseph [ Joseph = "que l'éternel ajoute" ou "il enlève" ]

Zarzou a écrit:Deux choses me surprennent dans cet évangile...

La première : 19 Et le Seigneur cria disant : « Ma puissance, ma puissance, tu m’as abandonné. » Et, à ces mots, il fut enlevé. [élie (élija) = "mon Dieu est l'éternel"]

La vie est rendue lorsque la force des justes est entièrement consommée – lui la porté la force, la puissance jusqu'à la croix, et à la fin, à rendu jusqu'à la force. C'est un désespoir qui n'est pas une perte de la foi en Dieu, aussi même si le messie est désespéré, c'est toujours à Dieu qu'il en appelle pour cet échelon de souffrance.
Parvenu à cet échelon, comme une brûlure sur la peau ensuite, le silence se fait – la paix de l'accomplissement sépare l'âme du corps. « Tout est accompli ». Et il rend l'esprit.
Tu peux jeter un coup d’œil au psaume 21  .

Zarzou a écrit:La seconde : 33 et apposèrent sept sceaux ; et ayant planté là une tente, ils montèrent la garde.

Les sept sceaux apposés sur le tombeau du Seigneur, brisés révèlent les mystères de sa résurrection, à toutes les échelles, c'est à dire ce qu'il en est de la révélation de la vérité.

Zarzou a écrit:J'ajouterai à cela : Le jardin de Joseph [ Joseph = "que l'éternel ajoute" ou "il enlève" ]

Placer un tombeau dans le jardin de Joseph est faire reposer dans les lieux verdoyants de celui que l'éternel ajoute, ou de celui qui est enlevé.
Que sont, pour toi, les lieux verdoyants ?